Lors de la journée mondiale des réfugiés le 20 juin le Collectif Migrants47 a fait une conférence de presse sur ce sujet (voir l’article joint) de la Dépêche du Midi.
Episode à écouter sur la revue FAROUEST d’un parcours d’un journaliste
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Le Collectif Migrants 47 alerte sur la situation des « fantômes »
Publié le 21/06/2019 www.ladepeche.fr/
Un « fantôme », mineur, a dormi dix jours au bord du canal, sous une bâche, à Agen. Un autre a été mis dans un train avec, dans les mains, une carte de France. Le Collectif Migrants 47 alerte sur la situation des « dublinés » et des mineurs non accompagnés dont le nombre augmente en Lot-et-Garonne.
Compeau (1) raconte cette histoire le plus simplement qu’il le peut. En tentant de voiler son effort intérieur pour ne pas y mettre trop d’affect afin de décrire le plus objectivement possible la situation. « C’est le grand silence depuis plusieurs semaines. Il avait 19 ans. Je pense que l’on peut dire il avait ». « Il » n’a pas de nom. Il est l’un de ceux qui sont obligés de disparaître, de se faire oublier. De devenir invisible. Clandestin. Pour fuir. Pour échapper à la mort. Pour survivre. Il est l’un de ces « fantômes ». Là, c’était un « dubliné » (notre encadré). Il était Afghan.
« Parents décédés, persécutés par les talibans, explique Jocelyn Compeau, il s’était décoloré les cheveux en blond platine en arrivant en Europe. Son premier geste d’homme libre. En provenance de Finlande, il a été convoqué au commissariat d’Agen. Le lendemain, à 4 heures du matin, il a été renvoyé en Finlande. Puis expulsé en Afghanistan ». Et depuis… ce grand silence.
Jeudi 20 juin, aux Montreurs d’Images à Agen, le Collectif Migrants 47 est rassemblé pour une opération de « sensibilisation » dans le cadre de la journée mondiale des réfugiés. Jocelyn Compeau, appuyé par Claude Arnaud (2), multiplie les anecdotes poignantes, relatent les témoignages recueillis.
Des difficultés pour évaluer les mineurs
À Agen, un mineur non accompagné (MNA) a dormi dix jours au bord du
canal. Sous une bâche. Un autre a été raccompagné à la gare où il a été
mis dans un train. On lui a donné une carte de France. Pourquoi ? « Pour
qu’il puisse tenter sa chance dans un autre département ».
Si le Lot-et-Garonne ne collabore pas au fichier national biométrique
mis en place par ministre de l’Intérieur, il doit mettre à l’abri ces
gamins en détresse, isolés, qui errent comme des âmes en peine. Pour
cela, ces derniers doivent se faire connaître auprès du conseil
départemental qui doit les évaluer. Pour, par exemple, connaître leur
âge (si le garçon n’est pas reconnu mineur, il se retrouve à la rue). La
problématique est là, étant entendu que les tests osseux sont rarement
pratiqués ici et que la marge d’erreur est de deux ans.
L’évaluation est réalisée par des travailleurs sociaux. « Certains jeunes nous disent que ça dure 10 minutes mais nous n’avons pas vérifié », souligne Jocelyn Compeau. « On ne leur remet pas leur rapport d’évaluation », ajoute Claude Arnaud qui poursuit : « leurs récits sont subjectifs car ils ont bravé tous les dangers et leur corps s’est vite transformé.Ils sont suspectés de mentir ». Et puis il y a ceux qui se déclarent majeur en Espagne alors qu’ils ne le sont pas… Faire la part des choses. Trier. Chercher la vérité.
Selon le Collectif Migrants 47, le nombre de « dubinés » et de MNA est en nette augmentation en Lot-et-Garonne. « Donner un chiffre ne veut rien dire, souligne Claude Arnaud, car ils sont nombreux à être éparpillés dans la nature. On ne les voit pas ». Ce sont les fantômes. Nos fantômes. Ce sont surtout des humains.
« Dublinés » : « Une histoire de fou »
Le règlement de Dublin oblige les personnes exilées à déposer leur demande d’asile dans le pays européen dans lequel leurs empreintes et leur identité ont été enregistrées dans la base de données Eurodac. C’est souvent le premier pays par lequel ils ont pu entrer – souvent illégalement – en Europe à savoir la Grèce, l’Italie et l’Espagne. Une fois en France, là où ils rêvent de vivre, ils demandent à nouveau le droit d’asile mais ne sont pas toujours « dédublinés ». Ils sont donc renvoyés dans le pays européen d’entrée qui les expulse dans leur pays d’origine. « Une histoire de fou », commente Claude Arnaud (Solidarité RESF 47).
Le conseil départemental à l’écoute
Le Collectif Migrants 47 a été reçu récemment par le conseil départemental qui a fait preuve « d’une écoute bienveillante ». Les membres du collectif ont notamment demandé que plus de temps soit pris pour les évaluations des MNA.
Le Département doit enquêter pour vérifier les témoignages recueillis.
Le Collectif Migrants 47 ?
Fondé en mars 2017, le Collectif Migrants 47 est un
regroupement de 13 associations lot-et-garonnaises : Action des
chrétiens pour l’abolition de la torture (Acat), l’équipe 47 d’ATD-Quart
Monde, l’association « Bienvenue », la Cimade 47 Comité catholique
contre la faim et pour le développement (CCFD) Terre solidaire 47,
l’association Entr’aidEtoit, Ligue des droits de l’homme 47, Mouvement
contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP), Pastorale
des migrants, Délégation Périgord-Agenais du Secours catholique-caritas,
fédération Lot-et-Garonne du Secours Populaire, Solidarité réseau
d’éducation sans frontière (RESF 47).
L’union faisant la force, le but de ce collectif – ce n’est pas une
entité juridique – est de partager des informations sur les migrants
ayant obtenu, ou pas, le statut de réfugiés, titulaires, ou pas, d’un
titre de séjour qui séjournent dans le Lot-et-Garonne. Mais
seulement.Il sensibilise la société civile à leur accueil. Il rencontre
les autorités administratives. Il mène des actions (hébergement, aide
alimentaire, etc.)
(1) Cimade 47
(2) Solidarité RESF 47