La recherche scientifique, qui fournit pourtant des éléments essentiels à la vie démocratique, écrit Jérôme Fénoglio, le directeur du Monde, cette recherche scientifique n’apparait que très marginalement dans les confrontations d’idées et d’arguments. L’esquisse de campagne présidentielle qui se dessine ces jours-ci en fournit une illustration confondante, la cause des sciences n’est jamais assez prioritaire, Les politiques publiques, comme les investissements privés, semblent conçus pour limiter le déclin, sans jamais donner l’impression de viser le nouvel élan.
Dans le débat public, c’est encore pire. La recherche figure, certes, comme un passage obligé des programmes de tous les partis. Pour autant, elle n’apparait que très marginalement dans les confrontations d’idées et d’arguments. Exemple ? Un polémiste d’extrême droite, candidat non déclaré, y réécrit sans vergogne le passé ; démonstration par l’obscène de la nécessité d’une science historique qui puisse être opposée aux falsificateurs. Toujours dans le débat public, certains se montrent obsédés par les étrangers qui arrivent, mais beaucoup moins tourmentés par les Français qui partent, comme ces jeunes titulaires d’un doctorat qui finissent par s’expatrier par lassitude d’attendre un poste, ou des moyens à la hauteur de leurs capacités, la Prix Nobel de chimie 2020, Emmanuelle Charpentier, en a fourni un exemple récent.
Globalement, les débats tournent en boucle autour des thèmes, certes non dénués d’enjeux, de la sécurité et de l’identité, à rebours de ce qui vient d’arriver lors des législatives allemandes, où les Verts et les Libéraux ont accru leur audience en inscrivant notamment la recherche comme un dossier central de leur campagne. En France, les sciences sont même parfois délibérément écartées de la scène. Cet effacement est d’autant plus dommageable que, au-delà de son inscription dans le récit national, la recherche scientifique fournit des éléments essentiels à la vie démocratique. Sa méthode, tant qu’elle est tenue à l’écart des conflits d’intérêts, s’oppose aux fantasmes et aux manipulations. Son expertise donne la mesure des dangers, Son besoin de collaborations larges, souvent internationales, s’oppose aux enfermements locaux. La recherche, conclue le directeur du Monde, détient ainsi la clé des délibérations qui doivent conduire les citoyens à choisir entre tous les avenirs possibles.
Anny Soum-Pouyalet