Le royaume a été accusé en juillet 2021 d’avoir utilisé le programme informatique conçu par la société israélienne NSO, ce qu’il dénonçait comme des « allégations mensongères et infondées ».
L’enquête s’arrête là. Le tribunal de Paris a déclaré irrecevables les poursuites en diffamation intentées par le Maroc contre des ONG et médias français ayant révélé ou dénoncé le recours par Rabat au logiciel d’espionnage Pegasus, a appris Le Monde, vendredi 25 mars. L’avocat du Maroc a exprimé son intention de faire appel.
La juridiction a rendu dix jugements déclarant l’irrecevabilité des citations directes contre Le Monde, Radio France, France Médias Monde, Mediapart, L’Humanité, Forbidden Stories et Amnesty International. Les décisions s’appuient sur un article de la loi de 1881 sur la liberté de la presse, qui « ne permet pas à un Etat, qui ne peut pas être assimilé à un particulier au sens de ce texte, d’engager une poursuite en diffamation ». Les avocats du royaume soutenaient que leur demande était recevable parce que ce n’est pas l’Etat, mais une administration – les services secrets –, qui attaque en diffamation.
Plusieurs procédures judiciaires en Europe
Le Maroc a été accusé en juillet 2021 d’avoir utilisé Pegasus, logiciel conçu par la société israélienne NSO, dans le cadre d’une vaste enquête menée par un consortium de dix-sept médias internationaux sur la base de données obtenues par l’organisation Forbidden Stories et par Amnesty International. Parlant d’« allégations mensongères et infondées », le Maroc avait enclenché plusieurs procédures judiciaires en France, en Espagne et en Allemagne.
Le logiciel Pegasus permet, une fois installé dans un téléphone mobile, d’espionner l’utilisateur de l’appareil, par l’accès à ses messageries, ses données, ou par l’activation de l’appareil à distance à des fins de captation sonore ou visuelle.
Lors du procès, les avocats des organisations et médias avaient tour à tour demandé l’irrecevabilité de cette « procédure bâillon ». « Pas moins de six fois » entre 2018 et 2019, « la Cour de cassation est venue répéter, une première fois à l’Azerbaïdjan et cinq fois au Maroc, qui revenait à la charge, qu’il n’était pas recevable pour agir en diffamation » en tant qu’Etat, avait souligné Simon Foreman pour Amnesty International. « C’est un exercice de communication exclusivement », a-t-il argué.
L’avocat du Maroc, Olivier Baratelli, avait soutenu que ce pays avait « le droit de défendre l’honneur terriblement bafoué de ses services de renseignement » par des « journalistes irresponsables ».
Le Monde avec AFP