Antoine Wauters, lauréat du prix du Livre Inter, Delphine de Vigan, présidente du jury du livre Inter 2022, Eva Bettan, responsable du prix du livre Inter, sont les invités du Grand entretien de la matinale.
Le Grand entretien de ce lundi matin est consacré au prix du Livre Inter 2022, décerné à Antoine Wauters pour le roman “Mahmoud ou la montée des eaux”. Il était accompagné en studio de Delphine de Vigan, présidente du jury du livre Inter 2022, Eva Bettan, responsable du prix du livre Inter. Étaient également présents plusieurs membres du jury qui ont délibéré hier.
Ce roman se déroule en Syrie, au bord du lac El-Assad, un lac artificiel formé par la construction d’un barrage dans les années 60. Un vieux poète syrien, Mahmoud, raconte alors l’histoire de son pays, et la dictature, les tortures du régimes de Bachar el-Assad, avec une plume empreinte de nostalgie.
Faire ressentir ce qu’il se passe là-bas, en Syrie
“Je suis très très heureux. Je ne m’y attendais évidemment pas, on ne s’attend jamais à ce genre de récompense et de reconnaissance” a-t-il réagi, souriant. “Ce livre a été assez magique, sa réception depuis sa sortie en septembre dernier, ça a été beaucoup de très heureuses surprises.” “Je suis là et très heureux” insiste Antoine Wauters, qui explique avoir évidemment mis beaucoup de lui “dans la voix de ce vieil homme”.
Avec ce roman, le lauréat du prix du Livre Inter voulait combler un vide. On ne parle plus assez, selon lui, de la Syrie. “Je me suis dit que le fait d’exposer une parole qui relate ce qu’il se passe en Syrie depuis un certain nombre d’années, mais avec les mêmes mots, avait tendance à m’éloigner terriblement du sujet et à faire reculer mon sentiment d’empathie”, d’où l’écriture de cet ouvrage. “Je me suis dit que j’allais écrire l’histoire de la Syrie à travers la voix de ce vieil homme, en le laissant plonger dans ses souvenirs et les eaux de ce lac, avec une parole extrêmement simple, poétique.”
Une émotion “qu’on n’attendait pas”
Pour choisir le lauréat de la 48e édition du Livre Inter, les débats ont été vifs “mais toujours dans l’écoute et dans le respect de la parole de l’autre” malgré les divergence de point de vue assure Eva Bettan, responsable du prix. “On débat et on parle. Ce qui est important quand chacun découvre dans la parole de l’autre des choses auxquelles lui n’avait pas pensé. C’est accepter de changer d’avis.” “On ne voit pas le temps passer” ajoute la présidente du jury Delphine de Vigan, qui retient notamment “les choses magnifiques dites sur la littérature”. “Ce texte d’Antoine Wauters nous emmène aussi dans une émotion qu’on n’attendait pas.” Toutes les deux l’assurent, le livre est “ressorti rapidement” du lot, dès les premiers échanges.
Isabelle Jouy, membre du jury, a justement défendu le roman du lauréat, qui l’a touchée personnellement. “Ce qui m’a touché c’est ces gens qui sont dans la difficulté, vulnérables. On parle de la vieillesse, de la mort. Tous ces gens qui arrivent et qui n’osent pas parler, je trouve que vous leur rendez la parole” dit-elle en s’adressant à Antoine Wauters. “Oui, ça nous rapproche et ça nous pousse à se dire, ‘ça n’est pas si loin et c’est l’humanité’ qui est touchée”. Cécile Lajeunesse, elle, retient la poésie qui lui a donné de la force. “Ce vieil homme a vécu des horreurs, mais il est apaisé” . “J’ai fait un travail de pacification avec moi-même. Créer les conditions d’une paix intérieure pour opposer à cette brutalité dont il est question quelque chose d’humain, fraternel et doux” explique le lauréat.
Laurent Le Boterve, également dans le jury, raconte aussi “les échanges musclés” pour départager les candidats. “Le point de bascule de nos débats ça a été cette question de ‘qu’est ce que vous apporte la littérature ?’ et de penser au résultat, à ce que le livre nous procure, nous fait comme émotion” explique-t-il. “C’est presque un livre qui se dit plutôt qu’il se lit.” Ghislain Classeau et Aurore Carleton, membre du jury eux-aussi, étaient également présent en studio, évoquant tour à tour “le souvenir formidable de l’émotion de ce livre” et une “universalité incroyable, qui fait rentrer la poésie dans le quotidien”.
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