Plusieurs dizaines de jeunes étrangers isolés et les militants associatifs qui les soutiennent se sont rassemblés ce jeudi devant le Département de la Gironde à Bordeaux. Ils dénoncent l’absence de solution d’hébergement en cas de recours pour faire reconnaître la minorité. Les concernés n’ont pour alternative que le squat du Kabako.

« Les mineurs non-accompagnés (MNA) sont des enfants en danger, leurs remises à la rue doivent cesser en Gironde », martèle Aude Saldana-Cazenave, coordinatrice régionale de Médecins du Monde. Ce jeudi devant l’immeuble du Département à Bordeaux, des dizaines de ces jeunes migrants et leurs soutiens, notamment le collectif du squat Kabako, s’y sont élevés contre le traitement dont ils sont l’objet de la part de la préfecture et du conseil départemental de la Gironde.

« Nous ne venons pas ici, en France, pour voler ou faire n’importe quoi, mais pour aller à l’école, suivre une formation ou travailler, ce qu’on nous a refusé chez nous, raconte au micro N. originaire de Côte d’Ivoire. Nous sommes délaissés, ne savons pas comment faire pour manger et nous vêtir. »

N. a trouvé refuge au Kabako, ce bâtiment de la rue Camille-Godard où vivraient actuellement 50 personnes, à 5 ou 6 par chambre. Depuis début février, plus de 40 jeunes se sont retrouvés, comme lui, sans solution d’hébergement.

Vide juridique

Accueillis par le Département le temps de l’évaluation de leur âge par le Saemna, l’association qui statuait pour le compte du département déterminant ainsi s’ils peuvent bénéficier de l’aide sociale à l’enfance (ASE), ils ne sont plus pris en charge lorsqu’ils sont estimés majeurs. D’autres, environ une moitié de ces 40 personnes selon les estimations des militants du Kabako, ont bien été reconnus mineurs, mais le parquet de Bordeaux a remis en cause cette évaluation. C’est le cas de N., au motif qu’il ne dispose pas de papiers d’identité.

Il a donc entamé un recours, comme beaucoup d’autres jeunes. Sauf que le temps que dure cette procédure, « aucun cadre législatif n’est prévu pour les mettre à l’abri, donc l’État et le département se renvoient la responsabilité », indique Aude Saldana-Cazenave.

« Ils appellent le 115 mais le dispositif est saturé et pas adapté à ces jeunes vulnérables. Le Kabako reste la seule alternative à la rue, mais il ne peut pas accueillir tous les jeunes dans de bonnes conditions, et il est même sous le coup d’une expulsion. Pourtant, 48 jeunes qui ont vécu plusieurs mois au Kabako ont bien été reconnus mineurs à l’issue de leur recours, et on reçu une ordonnance de placement à l’ASE par le juge des enfants. Quelle perte de temps ! »

Rassemblement pour les mineurs isolés devant la préfecture et le Département de la Gironde (SB/Rue89 Bordeaux)

La Gironde ne répond plus

Selon la responsable de Médecins du monde et les animateurs du Kabako, « la préfecture a fermé la porte à toute solution concertée, et le Département ne répond plus ». Saluant la motion votée récemment par le conseil municipal de Bordeaux pour les inviter à trouver des solutions, ils demandent que « soit mis fin à cette honte » :

« Depuis 9 mois qu’il existe, le Kabako pallie les manques des autorités et cela fait des années que ça dure, estime Vincent. Avant nous, il y avait la Ruche, puis le Fort Life… Alors qu’à Toulouse, Nantes et Paris, des structures existent, gérées conjointement par les mairies et les départements. Qu’attendent nos élus locaux ? »

Aude Saldana-Cazenave redoute que la situation n’empire, si le gouvernement suit les préconisations « inacceptables » d’un récent rapport parlementaire « sur les problématiques de sécurité associées à la présence sur le territoire de mineurs non accompagnés ». Il propose de renforcer l’arsenal de contrôle des MNA, et de renverser la présomption de minorité.

Actuellement, un enfant est présumé mineur s’il ne peut démontrer qu’il a moins de 18 ans. Changer ce postulat serait « contraire à la Constitution, et à la Convention internationale des droits de l’enfant », selon un communiqué de l’Unicef réagissant à ce rapport.

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