Le Retour des vieux démons - On pensait l'affaire entendue depuis le renoncement du duo de choc Nicolas Sarkozy-Brice Hortefeux. Souvenez-vous. L'interpellation aux portes des écoles des enfants de parents exilés avait suscité un tel émoi que le Président de la République avait mis un terme à cette insulte à l'accueil en 2005. Depuis, à défaut d'un ministère de l'Asile, l'Education Nationale était restée la seule institution française où vacillait tant bien que mal la flamme de la patrie des droits de l'homme. L'école, unique espace institutionnel où, quelles que soient leurs racines, les enfants venus d'ailleurs pouvaient s'insérer à l'abri de l'arsenal répressif. C'est du moins ce que l'on pouvait penser lorsqu' en janvier dernier réapparurent les vieux démons. C'est Julia Pascual qui rendit compte des faits dans le journal Le Monde ( mercredi 5 février 2020). Flanqué de trois gendarmes, un père de famille arménien s'était rendu à la sortie de l'école où était scolarisée sa fille de 4 ans. Le lendemain, après une nuit passée au centre de rétention administrative de Toulouse, le père et la fillette étaient embarqués dans un avion pour l'Albanie tandis que la mère de famille restait hospitalisée en France. Leur crime ? Ne pas avoir obtempéré à une OQTF (Obligation de Quitter le Territoire Français). Quelques jours auparavant, un scénario identique s'était déroulé à Montpellier. Cette fois, accompagnée par la police, une maman était venue chercher ses enfants de 5, 8 et 11 ans. Le même jour à Toulouse, un père de famille encadré par la police récupérait ses deux enfants à l'école tandis que la maman était conduite directement au centre de rétention. Le lendemain des rafles du 27 janvier 2020, 31 personnes au total quittaient Toulouse-Blagnac pour Tirana à bord d'un avion affrété par l'agence européenne Frontex. (1) La quasi-totalité dans la région, dont la Lozère, ce département à la démographie galopante qu'illustrent moult villages surpeuplés ! De la Ligue des Droits de l'Homme à RESF (Réseau Education Sans Frontière) en passant par la Cimade, ce coup de barre sécuritaire suscite un vif émoi. Faut-il pour autant en être surpris ? Non si l'on s'en tient aux dernières mesures annoncées par le gouvernement. Ce dernier assume sans sourciller la mise à l'écart d'exilés issus de pays dit "sûrs", dont l'Albanie par ailleurs candidate à l'intégration au sein de la Communauté Européenne. Sus à l'immigration économique clament d'une seule voix les porte-voix de la Macronie. Analyse expéditive feignant d'ignorer les gangs, trafiquants, mafia et criminels en tous genres qui jettent des milliers d'Albanais sur les routes de l'exil. Moins de charter et plus de discernement dans l'étude des dossiers honoreraient ces fils spirituels de Charles Pasqua, « Terreur des Terroristes », et instigateur des rafles de sinistre mémoire aux portails des écoles. « L'ancien monde » comme diraient les nouveaux humanistes de la « start up nation ». Joël Combres (1) L’agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, appelée communément Frontex, est l'agence de l'Union européenne chargée du contrôle et de la gestion des frontières extérieures de l'espace Schengen. Elle est officiellement créée le 6 octobre 2016.