Par Enbata | Publié : 04/04/2022
Film-annonce L’hypothèse démocratique — Une histoire basque de Thomas Lacoste from La Bande Passante on Vimeo.
Le nouveau film de Thomas Lacoste présente une synthèse du conflit politico-militaire basque. Sa démarche d’historien du présent nourrie par une approche humaine et sensible ne décevra pas le public abertzale. Vous trouvez ci-après toutes les dates de présentation du film en avant première en Iparralde. Les contraintes économiques de la diffusion cinématographique font que l’ampleur de la diffusion ultérieure du film dépendra de la fréquentation du public durant ces avant premières. Nous invitons donc les lecteurs d’Enbata à s’y rendre nombreux.
Présenter en deux heures vingt minutes les cinquante années du conflit armé en Pays Basque tient de la gageure. C’est pourtant le pari que réussit Thomas Lacoste à qui nous devons déjà Pays Basque & liberté, un long chemin vers la paix (2020), ainsi qu’un court métrage. Il y parvient grâce à une série d’images d’archives exceptionnelles et d’interviews d’acteurs connus ou discrets de notre histoire récente.
Le désir d’objectivité dans une affaire aussi passionnée ne peut qu’être assez vain. Aussi Thomas Lacoste privilégie-t-il le point de vue du peuple dominé, sans pour autant ignorer celui des victimes et de négociateurs du côté espagnol. Il ne prétend pas à l’exhaustivité d’une narration qui restituerait le déroulement du conflit dans toute sa complexité historique. Le cinéaste fait des choix et privilégie la pédagogie et la compréhension, voire l’empathie. Il donne la parole à ceux qui ont tout donné, n’ont pas hésité à mettre le feu à leur propre vie, ont été parfois broyés par l’histoire. Tant il est visiblement conscient qu’aujourd’hui le déficit au détriment des Basques eux-mêmes est immense, pour expliquer les fondements d’une cause dont la plupart des observateurs européens et les médias ne saisissent que l’écume, souvent pour mieux déconsidérer les revendications de fond.
Pour ceux qui ont traversé ces périodes, les images recueillies par Thomas Lacoste raviveront souvenirs et émotions. Quant aux plus jeunes, ils comprendront mieux le contexte d’un passé qui explique le présent.
Le lecteur d’Enbata découvrira les extraits d’un débat télévisé du début des années 70 autour du procès de Burgos, avec la participation de Gisèle Halimi et de Piarres Larzabal ou encore un Koko Abeberry interviewé dans les rues de Gasteiz, durant l’Aberri eguna de 1978. Les femmes, trop souvent ignorées dans le combat basque crèvent l’écran, avec les témoignages d’Arantxa Arruti, d’Itziar Aizpurua et d’Arritxu qui ose expliquer le pourquoi du comment de la lutte armée et la logique de guerre dans laquelle nous étions plongés.
Le retrait, la sobriété et la réserve sont valorisées et ancrées dans la culture et les comportements des Basques. «Labur hitzetan eta luze egintzetan», dit le proverbe. Rien d’étonnant que les militants abertzale n’aiment guère parler d’eux-mêmes. Il faut savoir gré à Thomas Lacoste d’avoir su saisir quelques rares instants où les silences disent plus que tout. L’impossibilité à dire, l’indicible sont alors aussi denses que ce qui suit la dernière note d’une fugue de Bach. Egoitz Urrutikoetxea et d’autres avec lui, auraient pu se retrancher derrière le discours convenu ou la langue de bois, ils sont parvenus à fendre l’armure et sont bouleversants. C’est là un des mérites majeurs du film L’hypothèse démocratique, une histoire basque. Dans la filmothèque basque Thomas Lacoste mérite une place de choix.
Il faut être deux dans un conflit. Le camp d’en face s’incarne pour nous dans des générations de policiers, de gendarmes et de militaires, de sous-préfets, de préfets et de gouverneurs civils, de hauts fonctionnaires ministériels, de magistrats instructeurs, de procureurs et de juges, d’hommes politiques qui n’apparaissent jamais dans l’historiographie de notre pays. Leur rôle est pourtant déterminant dans la gestion et la perpétuation du conflit, par la détermination dont ils font preuve pour réduire la rébellion basque. Leur action se poursuit aujourd’hui. En termes de documents d’archives et de connaissance historique, les plus riches dépôts, les meilleurs spécialistes de la question basque sont à Paris et Madrid, dans les ministères de l’Intérieur et les services de renseignement. L’historiographie les ignore complètement, elle fait mine de les oublier. Il serait temps qu’historiens, journalistes et documentaristes s’intéressent à eux, les débusquent, les réveillent de leur paisible retraite et leur posent les questions gui fâchent.
La bande annonce du film: https://vimeo.com/688115218
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Dates de présentation du film en avant première en Iparralde :
Lundi 4 avril à 20h30, au cinéma Le Sélect de Saint-Jean-de-Luz (Donibane Lohizune)
Mardi 5 avril à 20h30, au cinéma Saint-Louis de Saint-Palais (Donapaleu)
Mercredi 6 avril à 20h30, au cinéma Haritz Barne d’Hasparren (Hazparne)
Jeudi 7 avril à 18h, au cinéma L’Atalante de Bayonne (Baiona)
Jeudi 7 avril à 20h30, au cinéma Association Maule Baitha de Mauléon-Licharre (Maule)
Vendredi 8 avril à 20h30, au cinéma Saint-Michel d’Arudy (Arudi) en Béarn
Thomas Lacoste sera présent à l’ensemble de ces avant-premières.
Les contraintes économiques de la diffusion cinématographique font que l’ampleur de la diffusion ultérieure du film dépendra de la fréquentation du public durant ces avant premières. Nous invitons donc les lecteurs d’Enbata à s’y rendre nombreux.