Par Christophe Berliocchi – c.berliocchi@sudouest.fr
La gérante d’un bar des halles a lancé une cagnotte pour aider le Sénégalais, vrai personnage de Bayonne, à retourner voir ses enfants au pays. Elle a récolté plus de 8 000 euros
Il s’appelle Dame Lo. Mais à Bayonne, tout le monde le surnomme Lo, Etchegaray, Saï Saï ou Mamadou ! Cela fait plus de 30 ans que le camelot originaire du Sénégal arpente les rues de Bayonne : il est ici chez lui. Et pour permettre à Lo de retourner au pays voir ses neuf enfants, qu’il n’a pas vus depuis deux ans, à cause de la pandémie, Samantha Rodriguez, la gérante de La Verbéna, un bar des halles, a ouvert une cagnotte en ligne : le résultat est exceptionnel, puisque la somme recueillie s’élève à 8 413 euros, avec 617 participants, en à peine une semaine !
« Merci, merci, mes amis, je suis très, très content. » Cet après-midi du samedi 19 février, une remise de chèque factice a été organisée. Mais l’argent est bien réel. Sur le carreau des halles, on ne sait si le grand Lo _ il mesure 2 mètres _ avait tout compris : « Facebook, Leetchi, Instagram, la traînée de poudre sur les réseaux sociaux, tout cela le dépasse un peu, confie Samantha. D’ailleurs il ne sait pas lire, donc il ne savait pas trop qu’on lui préparait une surprise. Lo est vraiment touché, la somme d’argent est énorme, je ne pensais jamais l’atteindre. En fait, c’est la preuve qu’il est très apprécié ici, toute la ville aime sa gentillesse. »
Samantha Rodriguez est à l’origine de la cagnotte versée à Lo pour l’aider à aller au Sénégal afin de voir ses enfants. Bertrand Lapègue/SUD OUEST
Arrivé par hasard
Lo, écharpe violette autour du cou, a le sourire indéfectiblement accroché aux lèvres. C’est dans la nature du vendeur ambulant sénégalais, originaire d’un petit village entre Dakar et Saint-Louis : « Je suis arrivé ici par hasard, j’ai regardé sur une carte de France, j’ai vu Bayonne et je n’en suis jamais parti », confie le Sénégalais, qui ne dispose toujours pas de la nationalité française. « Non, on ne me l’a jamais accordée… »
Lo, le vendeur ambulant de Bayonne. Facebook Samantha Rodriguez
« C’est un vrai personnage de la ville, raconte Jacques. J’ai participé à la cagnotte et, voyez-vous, je porte même une de ses ceintures. Je suis un de ses plus fidèles clients. Mes petites-filles arrivent bientôt pour les vacances et elles voudront aller voir Lo pour que je leur achète un bracelet ou une babiole, elles l’adorent. »
Je reviendrais à Bayonne, car c’est chez moi, je m’y sens bien, ma vie est ici maintenant…
« Etchegaray fait partie des murs de la ville, enchaîne Nicolas, un ami de Dame Lo. C’est magnifique de voir ce geste de solidarité de la part des Bayonnais, à l’heure où l’on ne parle que des dangers de l’immigration et du grand remplacement… Lo est l’exemple parfait d’une inclusion sociale réussie. À Bayonne, il est chez lui dans tous les bars, restaurants et commerce de la ville. » « On peut être fier d’être Bayonnais », clame Samantha, gérante du bar des halles depuis cinq ans et fidèle soutien de Tonton Laser, un autre de ses surnoms. Sur le même sujet
« Ah oui, dit Lo, partout où je passe on m’accueille à bras ouverts, on m’offre toujours un verre et même le repas, alors que je ne demande rien, je suis gêné, mais les gens sont très, très gentils ici. » Le serveur de La Verbéna lui ramène un Perrier tranche pour fêter l’événement, qui s’est conclu par un lancer de cotillons. « Avec tout cet argent, je ne sais pas quand je vais aller au Sénégal, mais, c’est sûr, je reviendrai très vite à Bayonne, car c’est chez moi, je m’y sens bien, j’aime ma vie ici… »