Publié le : 08/05/2023 – 07:04
Texte par : RFI
Le Chili a opéré un virage à droite, dimanche, lors de l’élection pour choisir les 50 personnes qui rédigeront une nouvelle Constitution afin de remplacer l’actuelle issue de la dictature. Un triomphe pour l’opposition qui a réussi à séduire l’électorat en promettant « ordre et stabilité » dans un contexte de crise sécuritaire et migratoire au Chili.
L’extrême droite est arrivée en tête du scrutin de dimanche qui devait permettre d’élire les 50 personnes chargées de rédiger une nouvelle Constitution pour le Chili. Elle totalise 35% des voix, suivie de la coalition présidentielle de gauche qui remporte 28% des votes et de la droite traditionnelle qui arrive en troisième position à 21%.
L’histoire se répète donc mais dans le sens inverse, explique notre correspondante à Santiago du Chili, Naïla Derroisné. Lors du premier processus constitutionnel, la gauche et les indépendants étaient majoritaires. Cette fois, c’est la droite qui obtient une majorité de sièges au sein du Conseil constitutionnel. Et le grand vainqueur, c’est le Parti républicain, d’extrême droite, avec 22 élus. Ce même parti qui ne cache pas son admiration pour le dictateur Augusto Pinochet et qui n’a d’ailleurs jamais souhaité changer de Constitution.
Pas de droit de veto pour la gauche
Ironie de l’histoire, c’est aujourd’hui lui qui va mener le bal pour ce nouveau processus et avec l’appui de la droite traditionnelle, ils pourront rédiger un texte à leur convenance, sans nécessité de trouver de compromis avec le camp d’en face. Il est donc fort probable que la nouvelle Constitution soit très similaire à l’actuelle, voire encore plus conservatrice sur certains aspects. « Nous avons toujours voulu ce qu’il y a de mieux pour le Chili et c’est pourquoi nous n’avons jamais voulu d’un processus constitutionnel, a réagi Luis Silva, élu membre de la Constituante pour le Parti républicain. Nous avons voulu participer à ce processus parce que nous sommes convaincus qu’il sera meilleur avec nous présents qu’avec nous absents et, en ce sens, nous allons coopérer pour qu’il en résulte le meilleur produit possible. »
La première proposition de Constitution, rejetée par un référendum en septembre 2022, devait instaurer de nouveaux droits sociaux, notamment en matière d’éducation, de santé ou de logement, reconnaître des droits aux peuples autochtones ou encore le droit à l’avortement.
Et la gauche n’aura pas son mot à dire puisqu’elle n’a pas décroché suffisamment de sièges pour faire jouer son droit de veto. Il lui sera également quasiment impossible de faire voter son agenda pour un État providence, pourtant l’une des fortes revendications de la population au moment de la crise sociale.
Référendum le 17 décembre
Malgré ces résultats, le président Gabriel Boric a tenté de rester positif : « À mon avis, un des points les plus pertinents, au-delà bien sûr de la montée inédite du Parti républicain, c’est qu’il y a une majorité diverse de Chiliens et Chiliennes qui se sont engagés publiquement pour bâtir une nouvelle Constitution pour notre pays et qui ont élu des conseillers et conseillères qui se sont manifestés publiquement en faveur d’une nouvelle Constitution pour le Chili », a-t-il souligné.
Le Conseil constitutionnel dispose de cinq mois pour rédiger sa proposition de nouvelle Constitution. Il recevra un avant-projet rédigé par un comité d’experts auquel il devra apporter des ajustements et amendements. Le texte comprend douze principes essentiels qui ne pourront néanmoins pas être modifiés, comme le fait que le Chili est une économie de marché. Il sera ensuite soumis à un référendum en fin d’année, le 17 décembre.
(Et avec AFP)