Le 8ème numéro de la revue annuelle, la bien nommée Gibraltar, un Pont entre deux Mondes propose un copieux menu sur ses 175 pages. Une esthétique sensiblement voisine de celle de XXI, la revue de grand reportage, la pipolisation en moins, des sujets sans doute aussi plus politiques, un engagement clair dans le dialogue nord sud avec la Méditerranée pour centre du monde.
A la Une de ce numéro 8, l’histoire du dessinateur catalan Josep Bartoli, qui utilisa autant le fusil que le crayon pour défendre la république espagnole, exilé au Mexique, il fut l’amant, l’un des amants, cachés de Frida Kahlo. Ici c’est son neveu, photographe qui fait le beau récit de la vie de son oncle mort en 1995 sans avoir pu retrouver sa patrie. Gibraltar offre un cahier d’une dizaine de pages de dessins de Bartoli principalement lors de la Retirada et de l’enfermement au sud de la France. Magnifique ! L’Espagne encore à la Une avec une enquête sur « le magot de Franco. » L’infame caudillo a pillé son pays amassant une fortune plus que conséquente et dont ses descendants profitent toujours. Incompréhensible !
Gibraltar se penche aussi sur ces territoires détruits par la rapacité des hommes et du système, Salsigne, dans l’Aude et sa mine d’or, aujourd’hui fermée qui a laissé derrière son poison : l’arsenic. Alméria en Espagne et son agro-industrie qui épuise le peu de réserve d’eau en forant le sol à des centaines de m de profondeur pour irriguer ses milliers d’hectare de fraises sous tunnel et qui exploite des saisonnières venues du Maroc, un récit sous forme de bande-dessinée. Autre récit : l’implacable montée des eaux qui peu à peu rend la Camargue à la mer.
Une belle histoire aussi, celle de cette palmeraie en Tunisie reprise en main après la révolution de 2011 par les habitants, gérés collectivement et dont les bénéfices sont exclusivement réinvestis dans du développement local. Et plein d’autres choses encore. Gibraltar dans les bonnes librairies et en commande sur www.gibraltar-revue.com
Jean-François Meekel