François Gérard Landreau vient d’être reconnu « Mort pour la France », un titre honorifique obtenue grâce à la persévérance de deux de ses petits-enfants. L’ancien soldat de la guerre de 14-18 est décédé en 1927 des suites d’une maladie contractée dans les tranchées.
« Nous avons fait ce qui aurait du être fait il y a 95 ans », avance Jean-Marc Sanchez. Son grand-père, François Gérard Landreau, enrôlé dans l’armée en 1914 à l’âge de 19 ans, puis démobilisé en 1919, est mort en 1927 d’une tuberculose articulaire contractée dans les tranchées. Cette maladie, qui provoque d’importantes douleurs, entraine progressivement une paralysie totale, puis la mort.
Ce n’est qu’en 2022, que ce poilu originaire de Cubzac-les-Ponts en Gironde est reconnu « Mort pour la France ». Cette mention honorifique posthume a pu être obtenue grâce aux procédures engagées par Jean-Marc Sanchez et de son cousin Gérard Eveillé, deux de ses 14 petits-enfants. Ce dernier « a déclenché la démarche », au cours de l’année 2021, selon Jean-Marc Sanchez, avocat de 52 ans, qui a « repris le flambeau » à l’automne dernier.
4 mois
Tout commence en 2021, lorsque Gérard Eveillé entame des démarches pour placer sa mère, Fernande, fille de François Gérard Landreau, en EHPAD. Il découvre alors des documents attestant que Fernande est Pupille de la Nation.
« Il a compris qu’il y avait quelque chose qui ne collait pas. Comment Fernande aurait-elle pu être Pupille de la Nation, si son père n’était pas reconnu comme Mort pour la France ? », explique Jean-Marc Sanchez.
Ce dernier, de son côté, avait commencé à se renseigner 5 ans plus tôt pour savoir si son père, âgé et isolé, pouvait être pris en charge par la Marine au titre d’ancien combattant. A l’automne 2021, les deux cousins se retrouvent par hasard après des années et sont amenés à évoquer le sujet.
« Je me suis rendu-compte que c’était les mêmes personnes, au même endroit, qui géraient les deux dossiers. Ça m’a permis de rentrer vite en contact avec elles », explique l’avocat.
En quatre mois seulement, le dossier aboutit. Un fait rare ! « Notre demande était peu contestable » précise Jean-Marc Sanchez.
De nombreuses difficultés
Mais ce ne fut pas une mince affaire – « des dizaines d’heures, des centaines de courriels, et manquait souvent des noms, ou des coordonnées » –, qui a bénéficié cependant de l’aide de plusieurs structures, comme la délégation de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre à Caen.
Le simple fait de localiser la tombe de leur grand-père s’est avéré difficile. C’est finalement dans un caveau familial, situé à Cubzac-les-Ponts, que repose la dépouille sans que le nom de François Gérard Landreau n’y soit mentionné. Bien que le nouveau statut de Mort pour la France soit acquis, donnant droit à une sépulture individuelle dans un cimetière militaire, la famille n’a pas souhaité transférer le corps, le passé ayant déjà été « bien assez remué ».
Lors de la cérémonie commémorant la fin de la Seconde Guerre mondiale ce 8 mai, un hommage sera rendu au poilu et son nom sera inscrit sur le monument aux morts de Cubzac-les-Ponts, sa ville de naissance et de décès. La date a été choisie dès l’acceptation du dossier, le 17 décembre 2021, pour permettre à Fernande, dernière fille en vie de François Gérard Landreau, d’assister à la cérémonie sans attendre le 11 novembre, date de l’armistice de la Grande Guerre.
Une famille éclatée
Fernande ne verra pas cette cérémonie. Elle est décédée en février dernier alors qu’elle s’apprêtait à avoir 100 ans. Si les deux cousins expliquent avoir fait ces démarches pour rendre un dernier hommage à leur grand-père, ils espèrent « renouer des liens familiaux ».
« Cette histoire, douloureuse, a totalement éclaté la famille. Tous ses membres ont été séparés et arrachés à leurs vies », regrette Jean-Marc Sanchez.
En 1941, la femme de François Gérard Landreau meurt à son tour, emportée par la maladie. Elle devient la « première victime collatérale » du drame familial. Les quatre enfants du couple, tous mineurs à l’époque et Pupilles de la Nation, sont séparés et placés dans des institutions, puisqu’ils sont à l’époque « adoptés par l’Etat ». Les deux filles de la fratries notamment, sont placées aux Augustins, une institution religieuse à Bordeaux. Ils ne se retrouveront que 50 ans plus tard.