Accusée de prôner un “islam radical”, une mosquée de la périphérie bordelaise était menacée de fermeture depuis la mi-mars. Le Conseil d’Etat a confirmé, ce mardi 26 avril, que la décision prise par la préfecture de la Gironde n’était pas fondée
Le Conseil d’État a apporté, ce mardi 26 avril, ce qui ressemble au point final d’une âpre bataille juridique entre la préfecture de la Gironde et le Rassemblement des musulmans de Pessac (RMP), qui gère la mosquée Al-Farouk, dans la banlieue de Bordeaux. Dans son ordonnance du 26 avril, l’échelon suprême de la juridiction administrative rejette le recours qu’avait formé le ministère de l’Intérieur pour demander la fermeture de ce lieu, soupçonné de prôner un « islam radical » et une « idéologie salafiste ». Le Conseil d’État estime même qu’en ayant ordonné cette fermeture de six mois, « la préfète de la Gironde a pris une mesure de police qui porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de culte ».
Plusieurs rebondissements
Cette décision avait été prise le 14 mars, suite à une enquête pointant « des prêches et des propos ayant régulièrement incité à ne pas respecter les lois de la République, justifié les attentats et valorisé la mort en martyr ». Mais dès le lendemain l’avocat niçois du RMP, Me Sefen Guez Guez, avait saisi le tribunal administratif. Il estimait en particulier que Fabienne Buccio, préfète de la Gironde, avait ordonné la fermeture « sans enquête policière ni audition. La surveillance n’a porté que sur des posts sur les réseaux sociaux. La mosquée s’est conformée aux demandes de la préfecture en les supprimant. » Sur le même sujet
Des arguments qu’il avait faits valoir devant le tribunal administratif de Bordeaux, tandis que, dehors, une centaine de musulmans manifestaient dans le calme, brandissant des pancartes demandant le « respect de la liberté de culte » ou critiquant le fait que la fermeture avait été prononcée juste avant le ramadan. Et au final, le 23 mars, le tribunal suspendait la décision de la préfecture. S’il reconnaissait un « caractère critiquable » aux publications ayant motivé la fermeture, il considérait qu’elles « ne présentaient pas un caractère extrémiste au point de provoquer la commission d’actes de terrorisme ».
Pas de lien
Nouvel épisode dès le lendemain avec l’appel devant le Conseil d’Etat, cette fois par le ministère de l’Intérieur. Et nouvelle manifestation de fidèles à Paris, dénonçant notamment la “diabolisation de la mosquée”, tandis que les juges écoutaient les arguments des deux camps. Au final le Conseil d’Etat estime que si un groupe de jeunes fidèles a pu justifier l’assassinat de Samuel Paty, leurs liens avec le RMP “ne sont pas suffisamment établis pour qu’on lui en impute la responsabilité”. Ou que si une publication sur le compte Facebook de l’association a suscité “un commentaire ouvertement antisémite” elle ne présente pas, en soi, de “caractère de provocation à la violence”. Sur le même sujet
Pour Me Guez Guez le dossier monté par le ministère de l’Intérieur était “clairement politique”. Tandis qu’Abdourahmane Ridouane, président du RMP, critiqué pour certaines publications sur les réseaux sociaux, se dit “soulagé, heureux et fier de la justice de ce pays que j’aime malgré les griefs que j’ai pu lui faire.” La préfecture de Gironde, quant à elle, ne fait aucun commentaire et se borne à “prendre acte de la décision du Conseil d’Etat”.