Le romancier tanzanien Abdulrazak Gurnah a été désigné pour le prix Nobel ce jeudi 7 octobre.
LIVRE – Le prix Nobel de littérature 2021 a été décerné à Abdulrazak Gurnah, pour ses récits sur le colonialisme et ses conséquences, a annoncé le comité Nobel ce jeudi 7 octobre depuis Stockholm. Le lauréat succède à la poète américaine Louise Glück, prix Nobel de littérature 2020, qui avait été couronnée pour “pour sa voix poétique indubitable qui rend l’existence individuelle universelle”.
Né sur l’île de Zanzibar en 1948 mais désormais installé au Royaume-Uni, Abdulrazak Gurnah est un romancier, figure de la littérature postcoloniale. Il a publié une dizaine de nouvelles en anglais, parmi lesquelles la plus connue Paradise en 1994. Désormais à la retraite, il a aussi été professeur de littératures anglaise et postcoloniale à l’université de Kent. Le comité Nobel a salué “son intransigeante et empathique compréhension des effets du colonialisme et du destin des réfugiés pris entre les cultures et les continents.”
Le prix Nobel de chimie 2021 a récompensé mercredi 6 octobre un outil de fabrication de molécules révolutionnaire. La veille, le prix Nobel de physique 2021 a récompensé mardi 5 octobre la prédiction du réchauffement climatique et des travaux sur les systèmes complexes tandis que le prix Nobel de médecine 2021 a récompensé des découvertes sur les récepteurs de la température et du toucher. Vendredi, le prix Nobel de la paix sera attribué. Le prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d’Alfred Nobel, clora la saison lundi 11 octobre.
Abdulrazak Gurnah, nouveau visage du Nobel
Historiquement très occidental, le Nobel de littérature remis ce jeudi à Abdulrazak Gurnah, écrivain africain et premier auteur noir récompensé depuis 1993, tient (enfin) sa promesse d’élargir son horizon. Le profil-type d’un lauréat a longtemps été assez facile à déterminer : un homme, Occidental et souvent Européen ; pas un auteur de best-sellers, souvent d’un relatif anonymat; écrivant ou étant traduit dans une langue lue dans le cénacle de Stockholm.
Sur les 117 lauréats en littérature depuis la création des prix, 95, soit plus de 80% sont des Européens ou des Nord-Américains – la France à elle seule a glané 13% des prix. Ils sont 101 hommes au palmarès pour 16 femmes. Mais au sortir d’un scandale #MeToo qui l’avait fait vaciller en 2018 – entraînant un très rare report du prix – l’Académie avait indiqué avoir renouvelé son approche pour davantage de diversité de genre et de continents.
“Avant, nous avions une perspective eurocentrée de la littérature, et maintenant nous regardons dans le monde entier”, avait confié Anders Olsson, le président du comité Nobel, à l’automne 2019. Le “mérite littéraire” reste “le critère absolu et unique”, a-t-il pris soin de réaffirmer au magazine américain The New Republic cette semaine.
Si Abdulrazak Gurnah écrit en anglais, pays dans lequel il s’est réfugié à l’âge de 21 ans après avoir fui Zanzibar à moment où la minorité musulmane était persécutée, son “dévouement pour la vérité et son aversion de la simplification sont remarquables”, a indiqué le comité Nobel. Son ouvrage le plus récent, Afterlives publié en 2020, atteste de son univers littéraire où “tout est en mouvement constant – les mémoires, les noms, les identités”.
“Ses nouvelles rejettent les descriptions stéréotypées et ouvrent notre regard à une Afrique de l’Est culturellement très diverse et mal connue dans d’autres régions du monde”, a encore souligné le comité Nobel.